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    Les orages et leurs ravages

    Introduction

    Les orages apparaissent dans un nuage à forte extension verticale appelé cumulonimbus (voir Fig. 1).

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    Figure 1 : Cumulonimbus (source http://www.passion-meteo.net/)

    La base de ce nuage se trouve approximativement à 200 ou 300 m au-dessus du sol alors que son sommet se situe au niveau de la tropopause qui, dans nos régions, avoisine une altitude de 12 à 15 km suivant la saison. Une cellule orageuse se caractérise par un diamètre d’environ 20 km et une durée de vie de l’ordre de 20 minutes. Si la durée d’un orage est d’une heure, c’est qu’en réalité 3 cellules orageuses sont passées dans les environs. Un orage se manifeste par la foudre. Celle-ci présente un aspect visuel (éclair) et un aspect sonore (tonnerre). La foudre est en réalité une décharge électrique qui se produit soit dans un nuage, soit entre deux nuages ou encore entre le nuage et le sol.

    Statistiques

    Dans notre pays, on compte en moyenne 95 jours au cours desquels les précipitations sont accompagnées de phénomènes orageux. Les extrêmes sont respectivement pour l’année 2012 où la fréquence des orages fut la plus grande (111 jours d’orages) et pour 1940 caractérisée par la plus faible activité électrique observée (37 jours). Un jour d’orage était considéré comme un jour pendant lequel le tonnerre avait été entendu. Cette définition initiale, modifiée avec l’introduction du système SAFIR (Système et Alerte Foudre par Interférométrie Radioélectrique) au début des années 1990,  est devenue un jour au cours duquel ce système a détecté un coup de foudre.

    Observations dans le pays

    L’évolution au cours du temps ne permet pas de faire une statistique fiable sur l’ensemble de la série d’observations. En effet, la détermination de la fréquence des jours d’orage est liée à un réseau d’observateurs (voir Fig. 2).

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    Figure 2 : Réseau d’observateurs entre 1883 et 2000.

    On constate que le nombre d’observateurs est très variable au cours du temps. En outre, il a été  soumis à l’influence d’événements particuliers comme les deux guerres mondiales que notre pays a subies. Ces deux événements ont eu pour effet de provoquer une diminution du nombre d’observateurs. La figure 3 montre clairement cet effet sur le décompte du nombre de jours d’orages. Pendant la Seconde Guerre mondiale, le nombre de jours d’orage a diminué non seulement du fait que le nombre d’observateurs avait lui-même  diminué mais également qu’en outre ceux-ci avaient bien d’autres préoccupations durant cette période troublée.

    En 1992, le système SAFIR est introduit à l’Institut Royal Météorologique. Ce système détecte le champ électromagnétique émis par la foudre. Au départ, trois antennes ont été installées dans le pays à Dourbes, Oersel et sur le barrage de la Gileppe. En 1996, pour améliorer la précision de la détection des orages dans le nord-ouest du pays (région du Westhoek), une quatrième antenne a été installée à Mourcourt. La figure 4 montre un exemple de carte de détection des coups de foudre dans notre pays. Avec le temps, les performances du matériel et des logiciels ont permis d’accroître la précision de la détection des orages. Il s’ensuit que la détection des jours d’orage s’est surtout améliorée pour les « petits » orages qui se produisent principalement en hiver. Durant la période hivernale, la fréquence des orages a pratiquement doublé depuis l’entrée en opération d’un système SAFIR à 4 antennes. 

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    Figure 3 : Fréquence des orages en Belgique entre 1928 et 2006.

    La ligne verticale indique le moment où la détection des orages a été introduite à l’aide du système SAFIR.

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    Figure 4 : Carte des impacts de foudre lors des orages du 24 mai 2003

    Un autre outil pour le suivi des orages est le radar. La Belgique dispose sur son territoire de 3 radars : l’un à Wideumont (près de Libramont), un autre à l’aéroport national de Zaventem et, depuis peu, un troisième à Jabbeke. Ces radars permettent de suivre les foyers orageux en temps réel, d’avoir une indication des intensités de précipitations pendant l’orage, de repérer les zones dans lesquelles de la grêle est susceptible de se former ainsi que de déceler la signature de tornades éventuelles.

    Les deux images SAFIR et radar de la figure 5 montrent la situation lors de l’approche d’un front orageux le 27 juillet 2013 (à 01 heures en temps universel UT).

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    Figure 5 : Comparaison de l’image SAFIR et l’image radar

    L’étendue des zones concernées et la variabilité du temps font qu’il n’est pas aisé de prévoir des orages à longue échéance. Quelques jours avant l’échéance seulement, il devient possible de prévoir une situation potentiellement orageuse. Mais ce n’est qu’à partir de la veille que l’on peut mieux circonscrire les zones où pourront sévir les orages avec un certain degré de dangerosité. Les modèles de prévision serviront alors à déterminer le ou les niveaux d’alerte qu’il faudra indiquer dans ces prévisions. À très court terme, les images SAFIR et radar pourront indiquer la ou les zones qui seront affectées par les orages. Malheureusement, dans l’état actuel de nos moyens d’observation, on ne pourra indiquer le lieu précis où les événements dangereux se produiront tel l’incident qui a affecté le festival du Pukkelpop à Hasselt à la mi-août 2011.

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    Figure 6 : Structure d’un cumulonimbus. (http://la.climatologie.free.fr/orage/orage.htm)

    Ravages consécutifs à des orages

    Les orages sont des événements météorologiques qui peuvent conduire à des dégâts parfois extrêmement importants. Les dégâts associés peuvent être liés à la force du vent, à l’abondance des précipitations, à la grêle, à la foudre et/ou aux tornades.

    Les exemples de dégâts liés à la force du vent sont nombreux. Dans un nuage d’orage, de fortes rafales peuvent se développer, le plus souvent sous la forme de downbursts  ou rafales descendantes. C’est ce qui s’est produit lors de l’orage du 14 juillet 2010 qui s’est déplacé depuis Fumay (France) jusqu’au-delà de Ciney. Le long de son trajet, on pouvait voir que tous les arbres étaient tombés dans la même direction. C’est au cours de cet orage que la collégiale de Ciney a perdu une partie de son clocher. Plus dramatique fut l’orage qui s’est abattu sur le festival du Pukkelpop le 18 août 2011, tuant au moins cinq personnes suite à l’effondrement de deux scènes et d’écrans géants installés sur le site ainsi qu’à des arbres déracinés.

    Des dégâts liés à l’abondance des précipitations sont également fréquents. Dans certaines situations, ils peuvent même être qualifiés de spectaculaires dès lors que les orages peuvent donner des précipitions très abondantes en un temps relativement bref. Quelques exemples seront donnés un peu plus loin, mais les images des inondations survenues à Ittre le 29 juillet 2014 ont montré, qu’en un court laps de temps, l’eau des rivières pouvait monter à un niveau atteignant parfois le premier étage de certaines habitations (voir Figure 7).

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    Figure 7 : Vue des inondations en fin de journée le 29 juillet à Ittre. En médaillon, une vue « normale » sur Google Street. Source : http://www.meteobelgique.be/.

    Souvent les orages peuvent être accompagnés de grêle : c’est la peur des agriculteurs et surtout des fruiticulteurs. En effet, même des grêlons de petites tailles peuvent causer des blessures aux fruits les rendant impropres à la consommation.  De plus, la taille des grêlons est très variable. Il n’est pas rare de voir des grêlons de la taille d’une balle de ping-pong voire même d’une balle de tennis. L’orage du 8 juin 2014 a été accompagné de tels grêlons provoquant des dégâts importants en plusieurs endroits de Belgique, principalement dans la région bruxelloise et ses environs, tandis que la Flandre (Knesselaere, Wingene, …) également avait été touchée. Le 2 juillet 1991, des orages accompagnés de grêle ont frappé Vilvorde et causé des dégâts sur le parc de stationnement automobile des usines  Renault où 8600 véhicules neufs ont été abîmés par des grêlons.

    D’autres méfaits liés aux orages sont dus à des coups de foudre. Ceux-ci peuvent déclencher des incendies dans les bâtiments touchés par la foudre ou provoquer la mort d’animaux dans les prairies. Dans la nuit du 22 au 23 août 2011, la foudre est à l’origine d’un incendie qui a détruit le toit d’une aile de l’école des Ursulines à Mons. La foudre peut provoquer des dégâts dans les installations électriques. Pour cette raison, par temps d’orage, il est conseillé de mettre hors service ou d’éteindre tous les appareils électriques en les débranchant ainsi que les antennes. Lorsque la foudre touche le sol, les animaux ayant  des pattes sur deux niveaux de potentiels différents peuvent être électrocutés et tués. Il en est de même pour l’homme. L’homme en marche peut également être victime d’un coup de foudre ; alors qu’à l’arrêt, s’il ne bouge pas et garde les pieds joints (ou mieux se tient sur un seul pied)  ou s’il court, et n’ayant dans ce cas constamment qu’un seul pied au sol, il ne risque rien dès lors qu’il ne risque pas d’être soumis à une différence de potentiel suite aux courants induits. En 1998, lors d’un match entre Bena Tshadi et Basangana en République démocratique du Congo, la foudre s’abat sur le terrain. Tous les joueurs de l’équipe de Bena Tshadi sont tués par la foudre ; du côté de Basangana, tout le monde est indemne : le choix de crampons moulés plutôt que vissés leur aura sauvé la vie ! (source Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_de_morts_insolites).

    D’autres sinistres enfin peuvent être causés par des tornades qui se développent au cœur d’un orage. Il s’agit ici d’un phénomène de tourbillon de vent très violent prenant naissance dans le cumulonimbus  lorsque des cisaillements de vent se produisent  au sein du nuage. Ce tourbillon prend naissance à la base du nuage puis s’étire vers le sol. En touchant le sol, le tuba provoque une envolée de matière, principalement les débris des habitations qu’il détruit. Cette matière autour du tuba s’appelle le buisson. La région la plus favorable à l’apparition de ces phénomènes est la Tornado Alley dans les grandes plaines des États-Unis. Au printemps, la rencontre des masses d’air tropical venant du Golfe du Mexique et des masses d’air polaire venant en droite ligne des régions arctiques favorise le développement de tornades. Dans notre pays,  ce phénomène n’est pas si rare. En effet, depuis 1982, il est tenu à jour une liste des tornades qui provoquent des dégâts. Il en résulte que la fréquence des tornades dans nos régions est comprise entre 2 et 7 tornades par an. Depuis cette date, c’est en 2006 qu’a été dénombré le plus grand nombre de tornades avec 11 tornades référencées.

     

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    Figure 8 : Empreinte d’une tornade qui s’est produite le 21 janvier 2008 dans le Limbourg. L’image montre la cellule orageuse cinquante minutes plus tôt lorsqu’elle se trouvait encore dans la Province d’Anvers. C’est à  ce moment que la signature caractéristique d’une cellule en rotation  apparaît le plus clairement. Source : http://www.meteo.be/meteo/view/fr/5871324-une+tornade+dans+la+commune+de+Peer.html

    Quelques intensités remarquables (source : http://www.meteo.be/meteo/view/fr/1103327-Orages.html) :

    ·        24-06-1953 : Deux orages successifs donnent le total pluviométrique journalier le plus élevé du siècle observé en Belgique [En moins de douze heures, il est tombé 242 mm d’eau dans le pluviomètre à Herbesthal (Lontzen)].

    ·        14-05-1906 : Un violent orage, accompagné de grêle, donne des averses très intenses dans la région de Louvain. La mesure au pluviomètre à Louvain même conduit à un relevé de 174 mm, mais cette valeur sous-estime la réalité, à cause d’une capture insuffisante des grêlons : on estime au moins à 200 mm la quantité d’eau tombée en 3 h 15. Des inondations conduisent localement à des dégâts très importants, notamment à Bertem.

    ·        05-07-1985 : A Voeren, on observe une averse orageuse très intense : 51 mm récoltés au pluviomètre en un quart d’heure. Ce même jour, on mesure 120 mm en moins de quatre heures à Neu-Hattlich (Eupen) et une cote journalière de 102 mm à Botrange (Waimes).

    ·        13-09-1998 : Journée exceptionnelle par l’abondance des précipitations, principalement dans les provinces de Flandre orientale, Anvers, Brabant flamand, Limbourg et Liège. Neuf stations récoltent plus de 100 mm en vingt-quatre heures : 101 mm à Stabroek, 112 mm à Diest, 120 mm à Liège-Monsin, 123 mm à Westerlo et Ransberg (Kortenaken), 126 mm à Rillaar (Aarschot), 136 mm à Brasschaat, 140 mm à Viersel (Zandhoven) et 147 mm à Wijnegem.

    ·        Le 29 juillet 2014 au matin, l’observateur de Knokke-Heist signale que les 75,5 mm recueillis au pluviomètre sont tombés entre 5 h 45 et 6 h 30 soit en 45 minutes. Le soir, un orage dans la région de Ittre aurait donné plus de 80 mm de pluie en 1 h 20. Cette valeur a été extrapolée à partir des images radar, aucune  station dans le voisinage d’Ittre n’ayant donné de cote pluviométrique notable.

    Conclusion

     Les orages sont des phénomènes relativement fréquents dans notre pays. Ils peuvent conduire à des dégâts relativement importants et aucun endroit en Belgique n’est à l’abri d’un évènement extrême associé à ce type de phénomène météorologique.