Commentaires récents
    Archives
    Catégories
    Catégories

    El Niño 2006-2007: un événement contrarié

    Communiqué de presse IRD – 6 mars 2003
    A la suite de signaux observés à partir d’avril 2006 par des chercheurs de l’Institut de recherche pour le développement lors de campagnes in situ dans le pacifique ouest équatorial et au large des côtes péruviennes, on attendait d’El Niño 2006-2007 un réchauffement très important de la surface de l’océan Pacifique tropical. Cet événement, au final, ne s’est pas produit à cause de conditions océaniques et atmosphériques, qui sont, pour l’instant, difficile à prévoir.
    Le phénomène ENSO (El Niño Southern Oscillation) correspond à la variabilité climatique la plus forte de la planète à l’échelle inter annuelle. Il se caractérise, schématiquement, par une alternance entre une phase anormalement chaude (El Niño) et une phase anormalement froide (La Niña) des températures de surface dans l’océan Pacifique tropical. La période de récurrence d’El Niño est variable et se situe en moyenne entre 3 à 7 ans. Lors d’un événement El Niño, les eaux très chaudes (supérieures à 28°C) de la couche de surface du Pacifique Equatorial Ouest se déplacent vers le centre du bassin, la pression atmosphérique à la surface de la mer augmente à l’Ouest et diminue à l’Est, les vents alizés diminuent et parfois se renversent. L’inverse se produit lors d’un événement La Niña. Il est maintenant bien établi que les modifications ENSO du Pacifique tropical affectent l’ensemble de la planète, à des degrés divers, avec, en particulier, de forts impacts environnementaux et socio-économiques dans les pays de la ceinture tropicale.
    Des avancées considérables ont été réalisées au cours des 20 dernières années dans l’observation et la compréhension du phénomène ENSO, grâce à une collaboration internationale quasi exemplaire au sein de laquelle les équipes de l’IRD ont joué un rôle essentiel. Ces chercheurs de l’ORSTOM, puis de l’IRD, étudient ENSO depuis plus de 40 ans dans les régions occidentales et centrales du Pacifique équatorial, en participant aux réseaux d’observations in situ et spatiaux et à la modélisation du phénomène. Des progrès doivent cependant encore être réalisés dans la prévision d’El Niño. Le démarrage, la croissance rapide, l’amplitude exceptionnelle et le déclin rapide de l’événement El Niño de 1997-1998, considéré comme le plus fort du siècle dernier, n’ont pas été correctement prévus par les modèles statistiques ou dynamiques. Il en est de même pour le démarrage de l’événement El Niño actuellement en cours.
    C’est en avril 2006, faisant suite à des températures de surface plus froides que la moyenne qui perduraient depuis presque 6 mois, que les premières anomalies chaudes ont été mesurées dans la partie centre – ouest du Pacifique équatorial. L’apparition de ces anomalies faisait suite à un coup de vent d’ouest, phénomène atmosphérique synoptique dont la prévision est à l’heure actuelle impossible dans la région. Ces anomalies de températures élevées ont progressivement envahi l’ensemble du bassin équatorial, caractérisant un nouvel événement El Niño.
    En octobre 2006, dans la crainte d’avoir à faire face à des conséquences climatiques et sociaux-économiques aussi dévastatrices qu’en 1998, l’Instituto de Mar del Perú à Lima organisait, en collaboration avec l’IRD, un suivi hebdomadaire des conditions générales dans le Pacifique. La succession des ondes de Kelvin associée aux coups de vent d’ouest ne permirent pas aux anomalies de températures de surface de l’océan de dépasser 1.5°C dans l’est du bassin (comparé à 7°C pour l’événement de 1997-98).
    Depuis lors, les observations in situ et satellitaires semblent indiquer une diminution progressive de ces anomalies qui auraient donc atteint leur apogée en décembre 2006. Depuis la fin 2006 et le début de l’année 2007, la majorité des modèles de prévision d’ENSO indique également une décroissance de l’événement El Niño actuel au cours des prochains mois et un retour probable vers des conditions neutres vers mai – juin 2007.
    Il ne s’agit donc pas d’un événement exceptionnel, sauf, peut être, en ce qui concerne sa signature dans le Pacifique équatorial centre – ouest. Dans cette région, en effet, la température de surface a dépassé 29°C pendant toute la deuxième moitié de l’année 2006, fait relativement rare.
    Le réchauffement de 2006 est le 3ème d’une série de 3 événements de faible amplitude séparés d’une période de 2 ans (2002, 2004 et 2006). Cette succession inhabituelle d’événements pourrait traduire des changements des conditions moyennes dans le Pacifique tropical, résultat d’une évolution naturelle aux échelles de temps décennales ou alors induites par le réchauffement climatique.